Ce programme de trois ateliers d’une demi-journée chacune, conçu par l’IHEST et RIST, nous semble à la fois urgent et participant d’une construction sereine de l’avenir. Pourquoi?
Plongée dans les constructions de la connaissance et de la décision…
Les décideurs sont aujourd’hui confrontés à trois séries de facteurs qui :
- pèsent sur la prise de décision
- se sont largement amplifiés depuis une trentaine d’années
- la complexité des éléments à prendre en compte, le caractère systémique des décisions
- la nécessité paradoxale, de prendre le risque inhérent à toute décision dans un contexte social qui cherche le risque zéro
- le besoin d’anticipation constant, qui confine parfois à l’addiction et conduit à se projeter incessamment dans l’avenir et à obérer le présent, en effaçant le passé.
Par conséquent, pour éclairer les décideurs, qu’il s’agisse des dirigeants d’entreprises ou d’administrations, qu’il s’agisse des acteurs clé des politiques publiques nationales et territoriales, le recours aux experts est devenu incontournable. Il en est d’ailleurs de même pour le « public », autrement dit les « citoyens », les « électeurs », aussi bien pour comprendre les questions de société que pour leurs propres décisions individuelles et familiales…
RIST, se basant autant sur les écrits académiques que sur ses nombreuses expériences d’intervention dans les organisations, définit justement l’expert comme « un acteur capable, face à une situation complexe, incertaine et originale, de porter un regard prédictif nourrissant les décisions ».
Se pose alors la question de la légitimité de l’expertise. Comment distinguer l’expert prospectiviste du prédicateur, que ce dernier soit mû par la bonne volonté, soumis aux conflits d’intérêts ou encore suspecté de charlatanisme et de véhiculer de fausses conclusions ? La légitimité de l’expertise s’obtient et s’évalue grâce à au moins deux critères : le sérieux du socle sur lequel s’appuie la construction de l’expertise d’une part, et le constat de qualité des prédictions effectué ex post. Concernant le constat de qualité, sa difficulté réside précisément dans le fait qu’il soit réalisé a posteriori, c’est-à-dire précisément lorsqu’il est trop tard ! Cette légitimité s’acquiert donc dans la durée, dans l’humilité et la prudence, et non sur un « coup ». Elle implique donc un regard de l’évaluateur surplombant le passé.
Le socle, lorsqu’il est sérieux, se construit à l’aide de deux “ingrédients”, dont le dosage peut être très variable. Le premier est l’accumulation patiente d’expériences face aux situations dont les caractéristiques sont évoquées plus haut, c’est-à-dire la complexité, l’incertain et l’unicité. Le second, c’est la connaissance scientifique acquise à travers la démarche scientifique.
Mais « la » science, et la crise de la Covid 19 l’a bien révélé au public, donne l’état des connaissances à un moment donné, elle est évolutive. Elle ne détient pas LA vérité… Elle cherche, et la recherche s’effectue dans la controverse et ne devient science que lorsque la controverse est résolue, au moins temporairement, et que les scientifiques partagent un large consensus. D’autre part, cette connaissance scientifique n’est pas forcément aisée à actionner dans le monde commun des décisionnaires. Comme le rappelle récemment encore François Bernard Huyghe dans un rapport de l’IRIS «Observatoire (Dés)information & Géopolitique au temps du Covid-19» : « La production de la science n’est nullement synonyme de certitudes immédiatement applicables. […] « je ne sais pas », « je ne sais pas encore », « je ne suis pas de l’avis de mon collègue », « il faudra vérifier », « l’avenir nous le dira » font aussi partie de ce discours et il n’y a là aucune honte. Contradictions et hésitations (amplifiées par celles du politique qui voudrait se réfugier derrière la légitimité des experts) se révèlent chaque jour… Quant à « la démarche scientifique, elle consiste précisément à poser des questions et à contredire des hypothèses, à tâtonner et à avouer souvent que l’on ne sait pas vraiment ce qui résultera demain de la conjonction de déterminants présents mal mesurés ». Par ailleurs, selon Gaston Bachelard, la vocation de la science n’est-elle pas de se « dissocier de la réalité du monde ? » C’est ainsi qu’on élabore les connaissances qui vont ensuite basculer dans le monde réel, lequel se les appropriera. Là s’ouvre le champ de l’expertise…
D’où un certain malaise des scientifiques à entrer dans l’expertise, mais aussi une série d’interrogations qui se posent aux décideurs : quelle valeur attacher à l’expertise ? D’où parlent les experts ? Qui les a diligentés, rémunérés –lorsqu’ils le sont ? Sur quelles avancées scientifiques s’appuient-t-ils ? Quels modèles utilisent-t-ils pour effectuer leurs prévisions ? Comment sont construits ces modèles ? Selon quels paradigmes, quelles représentations, quelle idéologie ? Quels modèles prendre en compte et comment les construire ? Quel rôle peuvent avoir dans l’expertise le numérique et les algorithmes de décision ?…
Une telle problématique conduit à mieux s’interroger sur la relation entre science et expertise, entre science et société, entre expertise et expérience, entre expertise et décision, mais également entre citoyen et politique… Ce qui demande, dans l’urgence de nos situations, face à la soif de prédiction et à l’inflation de prédicateurs, de trouver des repères pour faire émerger de nouvelles pratiques concrètes.
Formule proposée aux participants :
Cursus en trois étapes sous forme d’ateliers interactifs, qui partent des questionnements des participants.
Les participants sont invités à venir échanger leurs expériences, s’interroger, débattre, et proposer des pistes de réponses, par un travail d’intelligence collective.
Invités à participer :
- des décideurs (entreprises, organismes publics, hommes politiques)
- des directeurs de rédaction de grands médias
- des managers
- des cadres experts
- des animateurs de dispositifs de production d’expertise
- des scientifiques habitués à être sollicités ou à se trouver en situation d’expertise
Travaux animés par Cécile Astier (IHEST) et François Fort (RIST).
Modalités de déroulement de chaque atelier :
- Echanges entre les participants guidés par les animateurs
- Ecoute d’un ou deux intervenants
- Approfondissement de la réflexion
Le processus est itératif. A titre d’exemple, les intervenants du 2ème atelier seront choisis à l’issue du premier, en fonction des échanges qui auront eu lieu, et des souhaits qui auront émergé. De fait, même si les intervenants sont identiques dans tous les groupes lors du 1er atelier, il est fort probable qu’ils ne le soient plus à partir du 2ème.
Les réflexions seront structurées selon le canevas suivant :
Atelier 1 :
- Objectifs :
- Identifier les problèmes concrets qui préoccupent les participants,
- Clarifier les notions d’expertise et de science et expliciter le besoin du recours à l’expertise
- Partager les expériences et favoriser l’émergence d’idées de mise en pratique
- Contenu des interventions (François Fort de RIST à chaque séance de l’atelier 1 ; Roger Genet, Directeur de l’ANSES au petit déjeuner du 16 mars):
Explicitation des problématiques : définitions, relations experts/scientifiques/décideurs
Quels sont les besoins des décideurs et leurs attentes en matière d’expertise ?
Qu’est-ce qu’un expert ? Comment se construit l’expertise ? Comment évalue-t-on l’expertise ? Quelle relation avec les scientifiques ?
Atelier 2 :
- Objectifs :
- Partager les pratiques et les analyser
- Approfondir la réflexion
- Contenu :
Retour sur les pratiques et l’appropriation, partage des expériences, généralisation pour mieux cerner les questions de fond
Interventions d’experts ou de chercheurs sur des exemples d’expertise.
Atelier 3 :
- Objectif :
Faire émerger des bonnes pratiques et des préconisations
- Contenu :
Sur le modèle des deux premières séances, le programme est ajusté en fonction des conclusions de la séance 2.
Livrable final :
Un rapport sur les résultats des trois groupes (à confirmer par les participants) diffusé aux élus et aux médias après avoir été validé par chaque groupe avant publication.
Par ailleurs chaque groupe recevra la synthèse de la vision des autres groupes. Versées aux débats, ces dernières pourront enrichir les réflexions, même si au sein de chaque atelier, les échanges sont et restent confidentiels. Ainsi les trois groupes réunis en parallèle auront-ils la possibilité de capitaliser sur les dynamiques différentes de chaque groupe.
Modalités pratiques :
- Trois ateliers d’une demi-journée, espacés de six semaines environ
- 6 à 10 participants par groupe
- Trois cursus identiques avec des variantes présentiel/distanciel :
- Groupe A entièrement distanciel
- Groupe B entièrement présentiel à Paris si le contexte sanitaire le permet
- Groupe C
- Atelier 1 en présentiel à Paris
- Atelier 2 en distanciel
- Atelier 3 au choix des participants
Tarif : 900 euros HT pour les trois ateliers
Calendrier :
Dates | Groupe A
tout présentiel |
Groupe B
tout distanciel |
Groupe C
présentiel puis au choix |
Atelier 1 | Mardi 1 février après midi | Vendredi 4 février après midi | Mercredi 2 février matin |
Atelier 2 | Lundi 21 mars après midi | Vendredi 25 mars après midi | Mercredi 23 mars matin |
Atelier 3 | Mardi 10 mai après midi | Vendredi 13 mai après midi | Mercredi 11 mai matin |
Echanges avec Roger Genet, Directeur de l’ANSES pour les trois groupes en visio lors d’un petit déjeuner le 16 mars 2022
Contacts information et inscription :
philippe.herally@rist-groupe.fr